Photographier des mains c’est se plonger dans l’autre visage du corps en actes. Souvent, en réalisant un portrait, mon regard se déporte vers ces mains qui parlent par elles-mêmes et appellent une autre écoute du récit du sujet. Elles racontent par la pratique de la matière. Soignées, burinées, inquiètes, rongées, posturales, usées, immaculées, elles cartographient par le réseau des veines, des pores, des soins et des blessures, le temps des actes.

 

Cette série in progress, propose ces mains prises au hasard des rencontres. Toujours, dans un moment d’écoute. Ce vieux monsieur d’une grande dignité, en costume trois pièces, qui boit du vin rouge à 11 heures du matin au fond d’un bouge. En feuilletant comme une découverte ses mémoires d’un passé révolu. Ces mains puissantes de boucher qui viennent à l’instant de saigner un mouton pour l’Aïd. Ces mains sacrificielles. Ces mains de paysans dont les taches se confondent avec le bois et la terre. Ces mains de motard, abimées par la mécanique, pleines des breloques brillantes qui causent de liberté…